• Le secret maçonnique (Partie 17)

    Aujourd’hui, la bourgeoisie règle les antagonismes en son sein, de manière pacifique, en ayant recours à la voie parlementaire et aux élections, pour choisir la fraction temporairement chargée de défendre ses intérêts au gouvernement. Pendant la révolution, ce choix était fait en ayant recours à la guillotine.

     

    Le secret maçonnique (Partie 17) 

     

    a)     Extraits de son œuvre :

     

    Sur la justice sociale : « Les grandes richesses corrompent et ceux qui les possèdent et ceux qui les envient. Avec les grandes richesses, la vertu est en horreur, le talent même, dans les pays corrompus par le luxe, est regardé moins comme un moyen d’être utile à la patrie que comme un moyen d’acquérir de la fortune. Dans cet état de choses, la liberté est une vaine chimère, les lois ne sont plus qu’un instrument d’oppression. Vous n’avez donc rien fait pour le bonheur public si toutes vos lois, si toutes vos institutions ne tendent pas à détruire cette trop grande inégalité des fortunes ». (Discours du 7 avril 1791).

    « La première loi sociale est celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d’exister ; toutes les autres sont subordonnées à celle-là ».

    « Peuple, souviens-toi que si la justice ne règne pas, la liberté n’est qu’un vain mot ».

    Sur la liberté du commerce : « La liberté du commerce est nécessaire jusqu’au point où la cupidité homicide commence à en abuser », car « il n’y a que l’excédent qui soit une propriété individuelle ».

    « Aller prêcher le culte de la liberté à ces spéculateurs avides qui connaissent qu l’autel de Plutus [dieu de la richesse dans l’antiquité romaine]. Tout ce qui les intéresse, c’est de savoir en quelle proportion le système actuel de nos finances peut accroître, à chaque instant du jour, les intérêts de leurs capitaux… » (Numéro du 4 juin 1792 du journal « Le Défenseur de la Constitution »).

    « Nul homme n’a le droit d’entasser des monceaux de blé à côté de son voisin qui meurt de faim ».

    Sur la démocratie : « La démocratie est un état où le peuple souverain, guidé par des lois qui sont son ouvrage, fait par lui-même tout ce qu’il peut bien faire, et par des délégués tout ce qu’il ne peut faire lui-même ».

    « Ce n’est pas être souverain que d’élire de temps en temps quelques représentants ».

    Pendant la constituante, Robespierre fera adopter par l’assemblé une décision à propos de la non-éligibilité des députés de la nouvelle assemblée : « Il faut que les législateurs se trouvent dans la situation qui confond le plus leur intérêt et leur vœu personnel avec celui du peuple ; or, pour cela, il est nécessaire que souvent ils redeviennent peuple eux-mêmes. Mettez-vous à la place des simples citoyens et dites de qui vous aimeriez le mieux recevoir des lois : ou de celui qui est sûr de n’être bientôt plus qu’un simple citoyen, ou de celui qui tient encore à son pouvoir par l’espérance de le perpétuer ? » (18 mai 1791).

     

    b)    Pourquoi la chute de Robespierre ?

    La Terreur a été une œuvre commune de toute la classe bourgeoise. Mais la bourgeoisie a profité d’une période d’affaiblissement de Robespierre pour, à la fois, éliminer celui-ci, et se débarrasser de la Terreur. En effet, fin juillet 1794, les troupes françaises, avec la victoire de Fleurus, triomphaient à l’extérieur. Ce qui est reproché à Robespierre est à la fois la mise en œuvre de mesures favorables aux sans-culottes par el groupe des robespierristes et, autre prétexte, la mise en place du culte de l’Etre suprême. Comme tous les hommes politiques bourgeois de l’époque, Robespierre présente un double aspect : à la fois, il est un représentant zélé de la bourgeoisie révolutionnaire, et aussi un organisateur de la nouvelle répression des classes laborieuses. En se débarrassant, par une sorte de coup d’Etat, de Robespierre et de son groupe, certains « terroristes », comme Fouché, se sont dédouanés eux-mêmes.

     

    A l’occasion de la mort de Danton, comme en tant d’autres, Robespierre fut le porte-parole et l’agent d’exécution de la bourgeoisie révolutionnaire. Les hommes des comités, d’accord avec Robespierre, sur le but général à atteindre, ne l’étaient pas avec lui sur les moyens. Robespierre voulait asseoir sa tentative de stabilisation sur deux piliers : d’une part, la restauration officielle de la religion, l’institution d’un culte d’Etat ; d’autre part, la recherche du compromis « honorable » avec l’ennemi du dehors. La bourgeoisie révolutionnaire voulait elle aussi rétablir l’ordre, mais par d’autres moyens. Elle ne fut d’accord avec Robespierre ni sur le culte de l’Etre suprême, ni sur la conduite de la guerre. Le culte de l’Etre suprême rassurait l’Europe. Il était tourné à la fois contre les prêtres, contre l’Eglise et contre les déchristianisateurs. Le culte de l’Etre suprême préfigure le Concordat de Napoléon Bonaparte. Dans la convention, les Montagnards robespierristes détiennent désormais tous les pouvoirs. L’élan révolutionnaire est désormais contrôlé par le comité de salut public, qui rappelle les représentants en mission trop indépendants, encadre les tribunaux révolutionnaires extraordinaires des armées au profit du tribunal de Paris.

    Les sans-culottes sont associés au pouvoir, mais leurs exigences de contrôle des salaires et des prix sont abandonnées. La vision d’une révolution morale, exigeante, utopique, tente de s’imposer. Le décret du 7 mai 1794, qui stipule l’existence d’un Etre suprême, pour lequel une fête est instaurée, et l’immortalité de l’âme, en est l’exemple le plus éclatant. L’athéisme et la vague anti-religieuse doivent faire place à une pédagogie civique. L’école propose aux enfants des faits d’arme les plus récents, et les patriotes héroïques comme Joseph Agricol Viala – célébré par Chénier dans le « Chant du départ » -- remplaçant les « martyrs de la révolution » -- Marat, Chalier, Le Peletier – glorifiés par les sans-culottes. L’idéal d’une organisation collective régie par l’égalité et la vertu est au cœur d’innombrables discours qui touchent tous les domaines de la vie nationale. Robespierre, entouré de Saint-Just et de Couthon, exerce véritablement le magistère national, même si d’autres personnalités compétentes dans certains domaines (comme Carnot à la guerre), jouent un rôle important dans le comité de salut public.

    Dans cette révolution dans la révolution, la tentation de la dictature est grande, pour établir par la violence le bonheur collectif à venir.

    Saint-Just : « Je demande qu’il [Robespierre] soit investi de la dictature, et que les deux comités réunis en fassent dès demain la proposition à la convention ». Prieur : « Saint-Just proposa aux comités de faire gouverner la France par des réputations patriotiques en attendant qu’il y eût des institutions républicaines ». Saint-Just dans « Fragments d’Institution républicaine » : « Il faut dans toute révolution un dictateur pour sauver l’Etat par la force, ou des censeurs pour la sauver par la vertu ». La Grande Terreur est instaurée par la loi du 22 prairial an II (10 juin 1794). Les coupables de « défaitisme et de dilapidation », qui sont appelés « ennemis du peuple », sont désormais justiciables du tribunal révolutionnaire. Edictée à la suite de tentatives d’assassinat sur des membres du comité de salut public, dont Robespierre, cette loi témoigne avant tout d’une volonté moraliste radicale.

    A l’été 1794, le règne de la Terreur était arrivé et n’importe qui en France pouvait être arrêté la nuit, jugé à midi, et guillotiné à quatre heures, sans même avoir pu ouvrir la bouche. Les députés n’osaient plus coucher dans leur lit. Barras, dans ses Mémoires, raconte qu’un député, ivre de fatigue, se tenait à sa place, le front appuyé sur sa main. Soudain, on le voit bondir de son siège, comme piqué par un scorpion. Simplement parce que Robespierre l’a dévisagé. Tremblant, décomposé, il se tourne vers un de ses collègues et balbutie : « Il va se figurer que je pense à quelque chose ! »

    La victoire de Fleurus, le 26 juin, rendait la Terreur moins indispensable comme moyen gouvernemental d’exception. Robespierre songea à épurer quelques députés, dont Fouché, qu’il fait chasser des Jacobins, et qui commença à conspirer contre lui. La Plaine, en échange de son appui, demande la fin de la politique de répression. Des divisions étaient intervenues au sein de l’équipe dirigeante, division au sein du comité de salut public entre :

    • Les administratifs : Lindet, Carnot, Prieur de la Côte d’Or.
    • Les idéologues : Robespierre, Couthon, Saint-Just.

    La dictature jacobine était devenue largement indépendante du mouvement populaire qui avait contribué à son établissement. Pendant une certaine période, de 1789 à novembre 1793, Robespierre a su jouer un rôle de médiateur entre bourgeois et « bras nus », qui l’a porté et en a fait une personnalité de pointe de la révolution française. Mais quand il a fallu choisir son camp, il a rompu avec les enragés et les sans-culottes, se tournant contre les intérêts de ceux-ci. Il n’avait donc plus le soutien de cette partie du tiers-état. Cependant, il allait trop loin par rapport aux intérêts immédiats de la classe bourgeoise, et son rôle antérieur inspirait la peur à beaucoup. En conséquence, il avait joué son rôle historique, et la bourgeoisie n’avait plus besoin de lui. Il pouvait donc disparaître, assumant les excès de la Terreur. Aujourd’hui, la bourgeoisie règle les antagonismes en son sein, de manière pacifique, en ayant recours à la voie parlementaire et aux élections, pour choisir la fraction temporairement chargée de défendre ses intérêts au gouvernement. Pendant la révolution, ce choix était fait en ayant recours à la guillotine.

     

     

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