• LE MINOTAURE BOUFFI Partie 7)

    La conception qu’a le président de l’action du personnel génère un comportement, partagé bien évidemment par le directeur général des services et tous les affidés : sur le fond, le travail est méprisé, et il en découle que les agents, de toutes catégories, des cadres aux agents de catégorie C, ne sont que des pions remplaçables et jetables. N’importe qui peut faire n’importe quoi, sans qu’il n’y ait de période d’apprentissage. En plus il y a un culte de l’élitisme des diplômes, et un mépris de l’expérience pratique et de terrain. Ainsi, le président, relayé par le directeur général des services, estime scandaleux que le service des finances, qui gère le budget d’une collectivité avec un total d’un milliard d’euros, soit confié à deux chefs de service qui n’ont comme seul bagage universitaire, pour l’un, Natacha Briand, un DEUG d’anglais, et pour l’autre, Renaud Panças, un CAP de dessinateur !

     

    LE MINOTAURE BOUFFI Partie 7)

     

     

    La conception qu’a le président de l’action du personnel génère un comportement, partagé bien évidemment par le directeur général des services et tous les affidés : sur le fond, le travail est méprisé, et il en découle que les agents, de toutes catégories, des cadres aux agents de catégorie C, ne sont que des pions remplaçables et jetables. N’importe qui peut faire n’importe quoi, sans qu’il n’y ait de période d’apprentissage. En plus il y a un culte de l’élitisme des diplômes, et un mépris de l’expérience pratique et de terrain. Ainsi, le président, relayé par le directeur général des services, estime scandaleux que le service des finances, qui gère le budget d’une collectivité avec un total d’un milliard d’euros, soit confié à deux chefs de service qui n’ont comme seul bagage universitaire, pour l’un, Natacha Briand, un DEUG d’anglais, et pour l’autre, Renaud Panças, un CAP de dessinateur !

    Ceux qui connaissent le président savent que, depuis au moins dix années, il y a des dispositions certaines à cette mégalomanie et cette boursouflure de l’ego. Depuis longtemps, la lumière humaine est très faible, et la pierre brute est trop difficile à tailler : ceci explique en particulier que le président n’a pas insisté pour présenter sa candidature pour entrer en maçonnerie.

    Une des spécialités du minotaure est, chaque fois qu’un agent du département l’appelle au téléphone, ou qu’il rencontre un agent départemental, et que celui-ci a l’outrecuidance de l’appeler « Monsieur », souvent parce qu’il ne le reconnaît pas, est de répliquer avec violence et prétention : « On dit Monsieur le Président. Des messieurs et des mesdames, vous en rencontrez d’innombrables tous les jours dans la rue, alors qu’il n’y a qu’un seul minotaure ! ». Cette volonté de puissance exorbitante se manifeste par le désir de dominer à tout prix l’emploi du temps des autres et d’être le maître de la façon de faire. Ainsi, le président oblige son chauffeur, lorsque celui-ci va le chercher à son domicile, à stationner le véhicule de service juste face à la porte du domicile, en montant le véhicule sur le trottoir, de façon à ce qu’il n’est que la porte de son domicile à ouvrir pour s’asseoir dans le véhicule.

    Un jour, le président reçoit l’un de ses cadres, pour la première fois, dans son immense bureau. Il l’installe dans un coin du salon, sur l’un des fauteuils de cuir. Lui-même s’assoit, le dos à la baie vitrée. Par celle-ci entre un soleil rayonnant, qui aveugle le cadre, qui n’aperçoit qu’une ombre présidentielle, incapable de distinguer les traits du visage. Par contre, le président a le dos tourné vers l’intérieur de la pièce, mais il ne propose pas à son cadre une place plus confortable, avec un peu d’ombre. Ce comportement manifeste son mépris à l’égard du technicien.

    Il n’y a plus aucun dialogue social, mais un autisme complet de la direction. La haine plus particulière à l’égard des militants de la CGT fait que pendant longtemps, le président n’a jamais daigné recevoir ceux-ci en audience privée. Au niveau des méthodes policières, le président fait installer un photographe sur le toit du siège du conseil général, afin de filmer les grévistes manifestants. Et lorsque les grévistes se sont introduits dans le parc du conseil général, afin de faire part de leur malaise, revendiquer une meilleure écoute et un plus grand respect de leur dignité dans le travail difficile qu’est le leur, le président a morigéné le directeur général des services et le directeur de cabinet qui n’avaient pas eu la présence d’esprit de boucler les portes du parc, afin de le protéger de la vile populace que sont les meilleurs de ses agents.

    Le directeur général des services insiste, auprès des différents directeurs, sur l’importance de surveiller le climat social dans les services départementaux. Cependant, la plupart des agents estiment que la direction ne répond pas à leurs préoccupations, tout ceci aboutissant à un dialogue de sourds.

    Pour organiser le culte du minotaure, a été installée à la tête du département une véritable nomenklatura socialiste, qui a accaparé à son profit des avantages démesurés et coûteux, grosses voitures, logements et autres. Pour mieux encore couper la direction de la base, et la tenir à merci, il est demandé aux membres de la direction, directeur général des services et directeurs généraux adjoints, de se comporter en « very important person » (V.I.P.) : tout leur est dû, logement, électricité, chauffage, téléphone, informatique, voiture, domesticité,… Il est inculqué à chaque agent la conduite impérieuse de crainte, et de servir obséquieusement cette nomenklatura, sous peine des pires sanctions, pouvant aller si besoin jusqu’à l’exclusion. Parallèlement, il est constamment rappelé aux membres de cette nomenklatura qu’ils sont nourris par le minotaure, et qu’il serait malvenu de « mordre la main qui nourrit ». C’est pourquoi lorsqu’un  membre est chassé, ou échappe au premier cercle du président, sa vie se transforme en enfer.

    Sans cesse afin de protéger le culte du minotaure, en suscitant l’envie et la crainte, le cercle de la nomenklatura est régénéré en ayant recours à des cabinets chasseurs de tête, pourvoyeurs de chair fraîche et d’esclaves consentants, tel le cabinet Profess d’Yuri Clamour. Ces cabinets, qui font fortune grâce au renouvellement périodique et constant de l’encadrement – près de 500 mouvements de divers agents au niveau du turn-over, avoués chaque année – créent le silence de l’omerta autour de ces pratiques affligeantes par les menaces suivantes : « Surtout ne parlez jamais à personne de la situation réelle, car vous ne pourrez plus jamais travailler avec des élus ! ». Au contraire, ces comportements déviants, qui s’exercent dans l’obscurité la plus noire, doivent être mis en pleine lumière, afin de rendre aux véritables élus leurs pleines et véritables prérogatives aux yeux du public avisé !

    A une année environ des prochaines échéances des élections cantonales, le conseil général est sans direction générale construite et organisée, avec des cadres terrorisés qui ne pensent qu’à sauver leur peau ou à déguerpir, et des agents démotivés. Le président a endossé l’habit surdimensionné du minotaure, aspirant à être reconnu et respecté comme tel par tous les agents, traité comme un grand bienfaiteur, se targuant en particulier d‘avoir, sans y être contraint par l’Etat et les divers transferts de compétences obligatoires, procédé au recrutement net de 450  agents départementaux supplémentaires. De façon manifeste, il prône en paroles des valeurs dites « de gauche », mais de façon latente, son ressenti est une insondable frayeur irraisonnée, de ne plus exister politiquement après 2012, et de mettre ainsi une fin à l’épisode du minotaure. Son ardent désir est d’être encore en place, en tout cas, d’occuper la place du minotaure, en 2012, et ceci à tout prix, peu importe les moyens utilisés pour y parvenir. Avec un sourire carnassier, le minotaure, avec en arrière-plan le jet d’eau du lac artificiel du parc aux allées en dédales du conseil général, devant les chefs de Pôle, assuré de son bon droit, impérial et donneur de leçons, se pavane. Car il sait qu’il est demandé à ces directeurs d’abandonner toute pensée personnelle et de tout sacrifier au seul dieu et maître, le minotaure, la sanction, en cas de déviation, étant automatique : le retrait de sa présence.

    La plus grande qualité du directeur général des services Duhaut est d’être une bouche d’or ; il peut pérorer des heures durant, d’un ton monocorde, sans exprimer aucun état d’âme, et en exposant des idées fixes et reçues. Il ne manifeste aucune qualité du leader tribun, aucun charisme, capable d’enflammer l’auditoire : d’ailleurs, le minotaure lui en laisserait-il l’opportunité ? Le don le plus remarquable et le plus précieux du directeur général des services est la capacité formidable de s’imbiber tel un buvard, du discours plaisant le mieux à son patron du moment, pour le restituer avec beaucoup d’emphase et de talent à tout auditoire consentant. Moraliste en paroles, il n’hésite pas par exemple à dénoncer avec véhémence les dynasties familiales mises en place et présentes dans les services, et qui, selon lui, entravent le bon fonctionnement desdits services. Avant de recevoir un encadrant, il fait dresser par le service du personnel, l’arbre de tous les membres de la famille de cet encadrant, présents dans le sociogramme départemental, que ce soient l’épouse ancienne, ou l’épouse actuelle, ainsi que l’ensemble des enfants des divers lits. Puis il ajoute également l’établissement par le même service du personnel d’une fiche précisant les avantages financiers, salaires, primes, promotions, avancement de carrière,…, de cet encadrant. Recevant l’encadrant, il casse la personnalité de celui-ci, faisant faire ce sale boulot par une tierce personne présente au cours de l’entretien. Ceci alors que, contradictoirement, le directeur général des services s’est attribué le maximum des avantages en nature, faisant même, nec plus ultra, embaucher son épouse et son fils par une structure para départementale !

    Toujours aimable et bien poli, le directeur général des services fait comprendre à son interlocuteur qu’il agit, non pas pour ses propres intérêts égoïstes, mais pour un intérêt supérieur, complaire au président, rendant ainsi à ce dernier le culte qui lui est dû. De cette manière, croit-il, le directeur général des services préserve sa place de premier officiant : qu’en est- il de la dignité humaine ? Et de la dignité attachée à sa noble fonction ? Jamais, il n’exprime véritablement une idée personnelle et originale, fondatrice, et de mémoire vive, nul n’a connaissance d’un travail ou d’un dossier traité intégralement et justement par le directeur général des services. Sa seule préoccupation est donc de surnager dans le marigot et de survivre, guidé par la seule peur bestiale, sa seule fin étant de rester aussi longtemps que possible en bons termes avec le président, afin de rester à la barre. Aucune directive n’émerge, aucun travail de management n’est entamé pour parvenir enfin, après plus d’une année de présence, à la création d’une direction collégiale, unie et efficace. Lorsqu’il préside un comité de direction, en présence de tous les directeurs de l’organisation, le principal thème de la réunion consiste à égrener les diverses rencontres inscrites sur son agenda, et qu’il va effectuer au cours des semaines à venir. En somme, gérer le département, c’est gérer les dates de son agenda. Chaque fois qu’un point est soulevé, immanquablement, il se tourne vers l’un ou l’autre directeur présent à la réunion, et demande, magistralement soit une réponse, soit une solution. A défaut d’une solution trouvée immédiatement, ou lorsque la pression exercée sur le cas soulevé est trop prégnante, il gratifie son interlocuteur, essentiellement quand il est en tête à tête, d’un vigoureux et tonitruant : « J’en ai marre ! », véritable comportement d’enfant gâté. Cependant son caractère obséquieux ne le préserve plus, et il parvient à peine à maintenir l’illusion d’une direction effective et efficace. Tout l’art de son « management » est de ne pas apparaître au premier plan, mettant le plus souvent possible en avant et en première ligne la responsabilité de ses collaborateurs les plus immédiats. De cette façon de se comporter résulte pour le directeur général des services un mépris certain non seulement des collaborateurs du cabinet, qui le surnomment invariablement et quasi officiellement « l’homme de caoutchouc » ou « bidenboum », mais aussi mépris de tous les agents, spectateurs impavides. Le directeur général des services ne se sent véritablement à l’aise que lorsqu’il peut voyager, pour se rendre à l’un ou l’autre colloque, à l’un des bouts de la France, et rencontrer les collègues responsables de collectivités similaires.

    Le président lui-même, avec beaucoup de lucidité, a apprécié les failles de cette gouvernance, et de la grande difficulté, après plus de deux années de présence de Duhaut, de mettre en place une organisation cohérente et efficace, reposant sur un organigramme construit. Le président a si peu confiance dans les capacités professionnelle de son directeur général des services, qu’il a choisi de réunir tous les quinze jours, le comité de direction regroupant les chefs de Pôles. Une fois tous les quinze jours, le directeur général des services anime les réunions du comité de direction, donnant invariablement lecture de son agenda à venir, et ne prenant aucune directive significative, risquant d’être démenti illico presto par le président ou son cabinet. Et tous les autres quinze jours, le président préside sans panache, les réunions du directeur général des services, directeur du cabinet et directeurs généraux adjoints. Mais le remède est pire que le mal, car comme personne n’ose prendre la parole, de peur de déplaire, surtout au minotaure, et que si quelqu’un, contraint et forcé, prend malgré tout la parole, c’est pour, de façon convenu, d’une manière ou d’une autre, chanter les louanges dudit minotaure. Chacun est là, bien présent, pour écouter cérémonieusement le minotaure, et passer avec conviction, délicatesse et consciencieusement, la brosse à reluire.

    Afin de le flatter, le président présente Dumilieu, chaque fois qu’il en a l’occasion, comme son « bras droit », et celui-ci le lui rend bien. Les agents chuchotent qu’en vérité, Dumilieu est le véritable patron occulte des services départementaux. Avec moins d’élégance, les agents de la base qui connaissent bien Dumilieu le surnomment par la lettre « G ». Dumilieu n’hésite jamais, chaque fois qu’il en a l’occasion, à défendre le système mis en place de façon dithyrambique, et à développer avec emphase des cours de moralisme sur l’autorité des chefs taillés à son image. N’est-il pas normal et tout à fait justifié que les « chefs » se voient mis à disposition d’innombrables avantages en nature, dont de grosses cylindrées, dont raffole Dumilieu, parce qu’ils travaillent mieux et bien plus que les autres agents. Comme il sait que c’est lui-même qui va jauger la teneur et l’évaluation de son affirmation, au moins tant que le culte du minotaure est préservé, il n’a aucune crainte à avoir et il peut continuer dans cette voie pernicieuse. Sa seule peur est de tomber en disgrâce. Aussi, il met un point d’honneur à postuler qu’un « vrai chef » est celui qui occupe et quitte son poste de travail respectivement avant et après l’arrivée et le départ des autres agents. Mais pour autant, il serait bien utile d’évaluer effectivement la valeur ajoutée de tels chefs !

    Dubas, directeur de cabinet, assume le ridicule jusqu’à mettre entre parenthèse sa propre personnalité afin de n’apparaître que comme le reflet et la doublure du minotaure. Etant le collaborateur le plus proche du président, par la situation physique de son bureau, et par la proximité temporelle, c’est sans doute la seule solution de rester bien en cour et d’assurer une certaine durée sur son poste. Duhaut a une peur irraisonnée et panique du directeur de cabinet, et il se méfie notamment de la compagne de celui-ci, qu’il a été obligé de recruter, avec fatalisme, comme c’est son habitude, au titre de directrice adjointe du service des finances et responsable du service contrôle de gestion et audits. C’est que Dubas a la lourde mission de veiller et valider les divers recrutements au sein des services, donnant ou non son aval, en fonction des opinions politiques des futurs éventuels recrutés. Il ne s’agit pas d’empêcher une pratique de « spoil systèm », installée dans la plupart des collectivités locales, et qui peut se concevoir en particulier au niveau des emplois de direction. Mais au moins  que, s’il est donné suite à l’embauche d’un agent en fonction de ses opinions politiques personnelles, que cela soit fait en fonction d’abord des qualités professionnelles, sinon supérieures, au moins égales par rapport aux autres candidats non encartés parti socialiste. Mais il se trouve que, afin de rendre service aux militants et « colleurs d’affiches », sans doute aussi afin d’émousser encore plus le peu d’autorité naturelle des directeurs et chefs de service en place, et aussi de complaire au culte du minotaure, ont été placés à divers postes stratégiques des militants du parti socialiste, sans qu’il y ait aucune utilité en matière d’activités professionnelles, ni aucun apport au niveau du travail quotidien. Le seul but est donc bien d’aménager et de consolider le culte du minotaure !

    Victoire Camdenface, directrice, déjà en place avant l’alternance socialiste, a effectué en 2005 un premier virage. Mais il lui est reproché aujourd’hui de trop rappeler l’ancienne équipe d’élus et l’ancienne direction. Comme elle souhaite terminer sa carrière dans le département, elle effectue un travail de damné, de dominicain et de romain pour se maintenir à flot. Ceci bien en vain. Certains jours, prête à toutes les compromissions, en espérant survivre, d’autres jours, écœurées physiquement par le contact avec le minotaure, au point qu’elle refuse de participer à des réunions avec lui, elle somatise son malaise. Mal de dos, car elle « en a plein le dos », mal de gorge et toutes autres difficultés se succèdent de façon de plus en plus rapprochée

     

     

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