• La franc-maçonnerie et la mixité (Troisième partie)

    Les valeurs en faveur de la mixité sont l’universalité de l’idéal maçonnique (la fraternité universelle). Comment peut-on prôner l’amour universel, en excluant a priori et d’office la moitié de l’humanité ?

    La franc-maçonnerie et la mixité (Troisième partie)

     

    Deuxième partie :

    Les femmes dans la franc-maçonnerie :

    La mixité au XVIII° siècle :

    Les motivations de l’exclusion des femmes dans les Constitutions d’Anderson de 1723, modifiées en 1738) sont de trois ordres :

    • 1) Les fondements du rituel reposent sur la Genèse. Les modèles féminins bibliques (la chute d’Eve, la trahison de Dalila par rapport à Samson,…) déterminent l’incapacité des femmes à devenir maçonnes ;
    • 2) Les femmes sont perçues par les francs-maçons comme une menace pour l’unité de leur fraternité. Les « charmes » de la femme représentent une menace pour l’unité fraternelle ;
    • 3) Les devoirs financiers des frères envers la loge semblent inexécutables pour la majorité des femmes de cette époque, dépendantes économiquement. En France, l’émancipation économique des femmes n’intervient qu’à compter des années 1970.

    Mais les Constitutions ont conduit à diverses autres exclusions :

    • Les personnes de couleur noire,
    • Les personnes  de religion juive ou musulmane,
    • Les 7 B : La franc-maçonnerie a été longtemps exclusive : exclusion des femmes, des hommes non blancs, des 7 B etc. Les 7 B sont : bâtard, bègue (et sourd), bigle, boiteux (et bancal, nain), borgne (et aveugle), bossu, bougre (sodomite, homosexuel). Le principe, encore au XVIII° siècle, est que : une déficience physique renvoie à une déficience morale.

    La première femme initiée semble être Elisabeth Saint Léger (1694-1773), initiée dans une loge irlandaise en 1744.

    Les loges d’adoption ont conservé un imaginaire et un discours de soumission sociale des femmes. Mais ces loges ont néanmoins permis à un milieu de femmes d’acquérir un statut qui, s’il n’était certes pas égalitaire, n’en constituait pas moins un progrès certain et les installait dans une partie de l’espace social dont elles étaient auparavant privées. Par exemple la loge « La Candeur », est adjointe à une loge d’adoption, composée uniquement de femmes. Depuis 1774, le Grand Orient de France reconnaît les loges féminines rattachées à des loges masculines. Ces loges féminines existent depuis 1740. Seules des femmes pouvaient diriger cette loge d’adoption. La majorité des franc-maçonnes étaient issues de la noblesse et des couches sociales aisées. La loge de la Candeur n’a adopté qu’une seule femme non titrée pendant toute la période de son activité. Dans certains milieux, le XVIII° siècle n’était donc pas misogyne : les femmes pouvaient participer activement à la vie de la société, notamment à travers les salons.

    La mixité au XIX° siècle :

    Les loges d’adoption fonctionnent à nouveau sous le premier Empire, en demeurant essentiellement destinées à des femmes issues de l’aristocratie, de la très haute bourgeoisie et du milieu artistique. Pour certaines loges, elles continuèrent, par à coups, jusqu’aux deux tiers du XIX° siècle.

    Le machisme ambiant conduit à répandre des sentences comme : « Les femmes véhiculent l’idéologie des prêtres », ou bien : « Monsieur va en loge deux fois par mois, et Madame à la messe chaque semaine. »

    Peu à peu, les Droits de l’Homme deviennent les Droits Humains, puis les Droits de la Personne. 1892 : initiation transgressive de Marie Deraismes à la loge « Les libres penseurs », de la Grande Loge Symbolique Ecossaise, à l’orient de Paris, au Pecq. 1893 : Création du Droit Humain, véritable obédience gérant des loges des trois premiers degrés. 1899 : Création du Suprême Conseil international chapeautant les hauts grades, au rite écossais.

    Et aujourd’hui ?

    Il y a une forte évolution des mœurs, avec le droit de vote des femmes en 1944. D’autres mesures émancipatrices sont prises : La loi sur le divorce, la liberté de contraception, la modification de la structure familiale, l’accès massif à la formation, à l’emploi et aussi au … chômage.

    Le développement de l’individualisme conduit à une atténuation de la logique de couple (famille monoparentales, etc.).

    La plupart des organisations sociales se sont progressivement orientées vers la mixité : écoles, université, armée, etc.

    Le développement de l’athéisme et de l’agnosticisme, la déchristianisation conduisent à la construction d’une civilisation post judéo-chrétienne. Les loisirs culturels augmentent, y compris pour les femmes (35 heures, demain 32 heures).

    L’émancipation est accélérée et réelle à partir des années 1970 (émancipation économique, et aussi sexuelle, avec la loi Veil).

    Les valeurs en faveur de la mixité sont l’universalité de l’idéal maçonnique (la fraternité universelle). Comment peut-on prôner l’amour universel, en excluant a priori et d’office la moitié de l’humanité ?

    Jamais, n’a été affirmé avec force, le principe de la démocratie. Ainsi, lors des divers convents, qui sont les congrès de l’obédience, donc les instances décisionnelles, on ne sait pas si s’applique le principe « un homme, une voix », ou le principe « une loge, une voix ». Un exemple frappant est la façon dont a été adoptée la mixité par les instances dirigeantes du Grand Orient de France, sans aucune consultation de la base. Si on ne peut qu’être d’accord avec le principe de la mixité, l’obédience étant jusque là alignée, quant à l’exclusion des femmes, sur l’un de ses pires ennemis réactionnaires, l’Eglise catholique, les deux « ordres », l’Eglise et le G.°. O.°. D.°. F.°., refusant l’initiation des femmes, on est en droit de s’interroger sur la méthode antidémocratique utilisée pour « imposer » en 2010, la mixité ; Ce fut un vrai diktat. Ce qui peut à juste titre inquiéter, c’est la prise de décision selon la même procédure dictatoriale demain, mais cette fois-ci dans un domaine entrant en contradiction avec les valeurs fondamentales de l’Ordre.

    Le G.°. O.°. D.°. F.°. était mal accompagné : l’Eglise catholique, et les fondamentalistes de toutes les religions refusaient jusque là la mixité.

    Dans les loges, on entend parfois dire que l’aspect initiatique de la franc-maçonnerie s’oppose à l’application de principes véritablement démocratiques. L’exemple qui en est donné est l’adoption, sous l’ère du président François Mitterrand, de l’abrogation en France de la peine de mort, alors, affirme-t-on, que l’  « opinion publique » était majoritairement favorable à l’application de la peine de mort. C’est là aller vite en besogne, et interpréter un peu facilement quels seraient les choix de l’opinion publique. Sur le fond, une telle position est une négation des principes démocratiques, et sans aucun doute un mépris du peuple. En fait, si l’on applique véritablement la démocratie populaire, cela consiste à donner à chaque citoyen les facultés d’un entendement éclairé, et un choix véritable. Il se trouve qu’aujourd’hui, à chaque fois, on assiste à une manipulation des consciences ! De même dans les loges, il ne faut pas craindre d’affirmer – notamment dans la Règle – les principes fondamentaux de la démocratie, et appliquer résolument et véritablement ceux-ci. Ne pas le faire, c’est ouvrir la possibilité à l’application d’autres principes (oligarchie, manipulation des consciences, sectarismes,…) !

    Une loge initiatique doit reposer sur une Règle, Règle mettant en œuvre les principes les plus démocratiques (« un homme, une voix), au moins en ce qui concerne les maîtres, ayant la plénitude des droits (et devoirs maçonniques), les apprentis et les compagnons étant considérés comme des « maîtres en devenir », destinés à bénéficier, dans l’avenir de ces mêmes droits (et devoirs).

    En cas d’absence d’une telle Règle, ou en l’absence d’une application rigoureuse de cette Règle (application de cette Règle, à géométrie variable), ce sont alors d’autres principes qui ‘appliquent : l’arbitraire  et la démagogie. Souvent, certains frères (ou sœurs) se comportent alors en « gourous », ou en « faiseurs de dois », manipulateurs.

    La Règle est le fondement de la liberté (notamment, la loi protège les plus faibles) et aussi de l’égalité : sans Règle, la fraternité n’est donc pas possible.

    La séparation des hommes et des femmes pour des raisons sexistes concerne des structures rétrogrades, en retard sur la féminisation générale de la société occidentale : l’Eglise catholique, l’Islam et une certaine maçonnerie.

     

     

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